Couverture pour Cahiers de Douai

Rimbaud, Cahiers de Douai
Soif de liberté ?
Dissertation bac corrigée



Introduction



Accroche



• Rimbaud, héritier des romantiques : valeur de Liberté.
• Allégorie de « La Liberté guidant le peuple » de Delacroix.
• Liberté qu’on retrouve dans la vie de Rimbaud.
• Fugues, intérêt pour la Commune de Paris.
• Errance jusqu’en Afrique.

Situation



• Les Cahiers de Douai : moment déclencheur.
• Il écrira ensuite en vers libres Les Illuminations, et Une Saison en Enfer.
• La liberté est bien un principe fondateur dans la poésie de Rimbaud.
• Et pourtant fuite en avant qui semble dissimuler une quête cachée…

Problématique



Cette soif de liberté suffit-elle à expliquer l’exceptionnelle créativité poétique de Rimbaud dans Les Cahiers de Douai ?



Annonce de plan



I. D’abord, Rimbaud est un adolescent qui se révolte à l’égard d’un ordre injuste, il veut se libérer, sa soif de liberté le conduit à s’engager politiquement, à explorer l’amour et à partir sur les routes.

II. Mais la liberté ne peut pas se résumer à l’errance, chez Rimbaud, elle révèle une vision philosophique plus complexe de la vie, de l’amour et du bonheur.

III. La soif de liberté explique magnifiquement l’œuvre de Rimbaud, mais elle produit surtout un débordement de créativité, un dérèglement de tous les sens.



Première partie :
Une soif de liberté



1) Liberté politique



◊ Exemple : « Morts de 92 »
• Rimbaud admire les martyres de la Révolution française.
• Mettre la Liberté devant la vie : cela fascine Rimbaud.
• Grandeur de mourir pour une Liberté collective.
Morts de Quatre-vingt-douze et de Quatre-vingt-treize,
Qui, pâles du baiser fort de la liberté,
Calmes, sous vos sabots, brisiez le joug qui pèse
Sur l’âme et sur le front de toute humanité ;


◊ Exemple : « À la musique »
• Remettre en cause l’ordre établi.
• Poète à l’écart, observation critique.
• Les baisers sont un symbole de poésie.
— Moi, je suis, débraillé comme un étudiant,
Sous les marronniers verts les alertes fillettes : [...]
Elles me trouvent drĂ´le et se parlent tout bas...
— Et je sens les baisers qui me viennent aux lèvres…




2) Une liberté amoureuse ?



◊ Exemple : « Les Réparties de Nina »
• Le poète est libre de partir en promenade amoureuse.
• Mais Nina n’a pas cette liberté et lui oppose un rival…
• Sa tresse est le symbole d’une chevelure qui n’est pas libre !
Riant à moi, brutal d’ivresse,
Qui te prendrais
Comme cela, — la belle tresse,


◊ Exemple : « Rêvé pour l’hiver »
• Le couple se réfugie dans un wagon pendant l’hiver.
• Le train est comparable à cette petite bête qui court.
• Errance = voyage sans but ?
Et tu me diras : « Cherche ! » en inclinant la tête,
— Et nous prendrons du temps / à trouver cette bête
— Qui voyage beaucoup…




3) Liberté ou errance ?



◊ Exemple : « Roman »
• Désinvolture à double sens : tomber amoureux, retour au café.
• Les tilleuls et la limonade sont bien fades…
— On n'est pas sérieux, quand on a dix-sept ans
Et qu'on a des tilleuls verts sur la promenade.


◊ Exemple : « Au Cabaret-Vert »
• Au-delà des tilleuls verts, la liberté apportera-t-elle le bonheur ?
• Dimension spirituelle cachée dans le rayon doré du soleil ? (référence à la bible : « ma coupe déborde »)
Du jambon rose et blanc parfumé d’une gousse
D’ail, — et m’emplit la chope immense, avec sa mousse
Que dorait un rayon de soleil arriéré.


Transition



Une liberté insuffisante en soi, pose des questions plus profondes sur le sens de la vie : s’engager, trouver l’amour, trouver le bonheur ?...



Deuxième partie :
La liberté à l’origine d’une soif de vie



1) Liberté et dignité



◊ Exemple : « Le Forgeron ».
• Donner la parole à un forgeron : un créateur et alchimiste.
• Le premier droit, celui de nourrir sa famille.
— Puisqu’ils ne mangent pas, Sire, ce sont les gueux !
Je suis un forgeron : ma femme est avec eux,
Folle ! Elle vient chercher du pain aux Tuileries !


• Mais au-delà du nécessaire, il revendique la dignité humaine.
Libérés, ils sont comme des chiens :
On les insulte ! Alors, ils ont lĂ  quelque chose
Qui leur fait mal, allez !


◊ Autre exemple : « Les Effarés ».
• Vision qui rapproche le lecteur de ces enfants abandonnés.
• N’ayant rien, ils sont comme de petits animaux.
• Le poète prométhéen leur redonne une voix.
[...] Ils sont lĂ , tous,
Collant leurs petits museaux roses
Au grillage, chantant des choses,
Entre les trous, [...]



2) Liberté d’un amour universel



◊ Exemple : « Soleil et chair ».
• Dans sa lettre à Banville, Rimbaud parle du credo, de la « foi des poètes » : une autre religion.
• Il partage un poème qui s’appelle Credo in unam, et qu’il recopiera sous le nom de « Soleil et chair » dans son premier cahier de Douai :
Le Monde vibrera comme une immense lyre
Dans le frémissement d’un immense baiser !
— Le Monde a soif d’amour : tu viendras l’apaiser.
Ô ! L’Homme a relevé sa tête libre et fière !


◊ Exemple : « Ma Bohème ».
• La liberté est une manifestation de cet amour universel « infini ».
• L’amour « d’une femme » est en fait un grand amour de la Nature.
Je ne parlerai pas, je ne penserai rien :
Mais l’amour infini me montera dans l’âme,
Et j’irai loin, bien loin, comme un bohémien,
Par la Nature, — heureux comme avec une femme.



3) DĂ©noncer un mal contre-nature



◊ Exemple : Le Mal ».
• Cet amour naturel et sain pousse le poète à s’opposer radicalement à ce qu’il appelle « Le Mal »
• Une religion au service d’ambitions politiques est contre-nature.
— Pauvres morts ! dans l’été, dans l’herbe, dans ta joie,
Nature ! ô toi qui fis ces hommes saintement !…


◊ Exemple : « Le Dormeur du val ».
• Dénoncer la guerre est surtout défendre une conception de la vie.
• Inventivité exceptionnelle dans ce poème.
• Acrostiche LIT du dernier tercet :
Les parfums ne font pas frissonner sa narine ;
Il dort dans le soleil, la main sur sa poitrine,
Tranquille. Il a deux trous rouges au côté droit.


Transition



La liberté de Rimbaud est émancipatrice : elle lui permet de trouver ses propres thèmes, et de repousser les limites de sa propre créativité.



Troisième partie :
Une créativité débordante



1) Remise en cause des canons de beauté dominants



◊ Exemple : « Vénus Anadyomène ».
• Oxymore « Belle hideusement ».
• Rimbaud voit tout de même de la beauté dans ces détails.
Les reins portent deux mots gravés : Clara Venus ;
— Et tout ce corps remue et tend sa large croupe
Belle hideusement d’un ulcère à l’anus.


• Comme les naturalistes : dire ce qui est vrai.
• Le poète rapporte des visions qui peuvent être dérangeantes.

◊ Autre exemple : « Bal des pendus ».
• S’inspirer de la tradition « Villon » pour remettre en cause le discours dominant et bien-pensant.
Oh ! voilĂ  qu'au milieu de la danse macabre
Bondit, par le ciel rouge, un grand squelette fou
Emporté par l'élan [...]


• À mettre en parallèle avec ce passage de la Lettre du Voyant :
Suprême Savant [...] qu’il crève dans son bondissement par les choses inouïes et innombrables : viendront d’autres horribles travailleurs ; ils commenceront par les horizons où l’autre s’est affaissé !



2) Une liberté qui confine à la folie ?



◊ Exemple : « Ophélia ».
• Symbole même de la beauté aux confins de la folie.
• La liberté ne se confond pas avec la rationalité.
Ciel ! Amour ! Liberté ! Quel rêve, ô pauvre folle !
Tu te fondais Ă  lui comme une neige au feu :
Tes grandes visions Ă©tranglaient ta parole
— Et l’infini terrible effara ton œil bleu !


• Ce même mot « effarer » comme dans « Les Effarés ».
• Atteindre les limites de ce qui est humain : tous les sens déréglés.


3) Repousser les limites de la poésie



◊ Exemple : « Ma Bohème ».
• Tout le poème est au passé, avec une certaine auto dérision.
• Le jeune poète s’est donc libéré de la Muse ?
J’allais sous le ciel, Muse ! et j’étais ton féal ;
Oh ! là là ! que d’amours splendides j’ai rêvées !


⇨ Le petit poucet rêveur va bientôt cesser de semer des rimes.
⇨ Les Illuminations et Une Saison en Enfer sont deux recueils en vers libres, sans rimes.

4) Une liberté donnée au lecteur



◊ Exemple : « Le Buffet ».
• Les histoires de ce buffet ne seront jamais racontées.
• Le conditionnel préserve le mystère.
• Mais Rimbaud laisse, pour ainsi dire, la porte ouverte à l’imagination du lecteur :
— Ô buffet du vieux temps, tu sais bien des histoires,
Et tu voudrais conter tes contes, et tu bruis
Quand s’ouvrent lentement tes grandes portes noires.



Conclusion



Bilan



• Dans Les Cahiers de Douai, la soif de liberté est première. Rimbaud est un adolescent révolté, qui remet en cause l’ordre établi.
• Ses fugues et ses expériences amoureuses le conduisent sur les routes, loin des tilleuls verts de la promenade !
• Mais cette soif de liberté n’est pourtant pas synonyme d’errance. Bientôt, on voit émerger d’autres principes dans la poésie de Rimbaud.
• Poésie engagée d’un poète prométhéen : défenseur de l’humanité.
• Ses poèmes d’amour cachent une philosophie plus profonde.
• Nouvelle méthode dans la « Lettre du Voyant » à Paul Demeny.
Il cherche lui-même, il épuise en lui tous les poisons, pour n’en garder que les quintessences. Ineffable torture où il a besoin de toute la foi, de toute la force surhumaine, où il devient entre tous le grand malade, le grand criminel, le grand maudit, — et le suprême Savant — Car il arrive à l’inconnu.

Ouverture



• Rimbaud inspire les surréalistes, qui vont explorer les limites des perceptions et de la réalité, pour chercher des vérités plus profondes !
• Par exemple, Paul Éluard, poète surréaliste :
Ce qui a été compris n'existe plus,
L'oiseau s'est confondu avec le vent,
Le ciel avec sa vérité,
L'homme avec sa réalité.

Paul Éluard, Capitale de la douleur, 1926.



Allégorie des émancipations créatrices.