Candide de Voltaire, Résumé détaillé commenté et analysé chapitre par chapitre
Au milieu du XVIIIe siècle, 1759, paraît un texte plein d'humour, où l'on trouve des propos extraordinaires :
Sur l'armée ?
« Un million d’assassins enrégimentés, qui exercent le meurtre et le brigandage avec discipline. »(chapitre XX).
Sur l'esclavage ?
« C’est à ce prix que vous mangez du sucre en Europe. »
Sur la religion ?
« Des moines qui enseignent, disputent, cabalent, et font brûler les gens qui ne sont pas de leur avis.  » (chapitre XVIII)
Candide représente parfaitement le registre satirique : une critique des travers de la société.
Pour faire passer ces idées de manière plaisante, Voltaire invente un genre nouveau, le conte philosophique : une histoire qui utilise les ressorts du conte pour nous faire réfléchir sur des concepts philosophiques, le bien et le mal par exemple.
Cela fonctionne parfaitement, car Candide est un succès énorme, réédité pas moins de 20 fois du vivant de son auteur.
I. Comment Candide fut élevé dans un beau château, et comment il fut chassé d’icelui
Nous sommes en Vestphalie dans le château du baron de Thunder-ten-tronckh.
C'est là que vit Candide, un garçon qui a le jugement droit et l'esprit le plus simple.
Candidus en latin, la couleur blanche : Candide sera le regard naïf par lequel le lecteur va découvrir le monde, et s'indigner.
Candide n'est qu'un bâtard de la soeur du baron.
Le baron - la baronne - leur fils - et leur fille Cunégonde sont très fiers de leur noblesse, mais l'ironie de Voltaire nous révèle combien ils sont pauvres.
Pangloss est le maître à penser du château, ridicule et pédant, il enseigne que :
— Tout va pour le mieux dans le meilleur des mondes.
Voltaire va l'utiliser pour démonter la philosophie optimiste de Leibniz. Selon lui, la Providence organise le monde le plus parfaitement possible : tout malheur est un mal nécessaire qui provoque toujours plus de bien par ailleurs.
> Pour en savoir plus sur ce passage, consultez mon commentaire sur le chapitre 1.
Un jour, Candide est surpris en train d'embrasser Cunégonde, il est alors renvoyé du château.
II. Ce que devint Candide parmi les Bulgares
Candide rencontre alors deux hommes habillés de bleu qui lui payent à boire : avant même de s'en rendre compte, il est enrôlé dans l'armée bulgare.
Voltaire montre une armée qui déshumanise les soldats en leur faisant croire qu'il vont devenir des Héros !
> Pour en savoir plus, consultez mon commentaire sur le chapitre 2.
III. Comment Candide se sauva d’entre les Bulgares, et ce qu’il devint
Les Bulgares combattent les Abares. "Boucherie héroïque", où Voltaire utilise les ressources du registre épique pour nous montrer les horreurs de la guerre.
> Pour en savoir plus, consultez mon commentaire sur le chapitre 3.
Candide se sauve et rencontre le bon Jacques, un anabaptiste : c'est un courant chrétien protestant, où l'on attend l'âge adulte pour être baptisé.
IV. Comment Candide rencontra son ancien maître de philosophie, le docteur Pangloss, et ce qu’il en advint
Arrive alors un misérable défiguré par la petite vérole. C'est Pangloss !
— Hélas ! Les bulgares ont détruit le château, violé mademoiselle Cunégonde, cassé la tête de M. le baron ; et découpé Mme la baronne en morceaux. Mais tout cela est bien, car les malheurs particuliers font le bien général.
Le bon Jacques fait soigner Pangloss et le prend comme comptable. Pour le commerce de Jacques, ils embarquent pour Lisbonne.
V. Tempête, naufrage, tremblement de terre, et ce qui advint du docteur Pangloss, de Candide et de l’anabaptiste Jacques
Lors de la traversée, le bon Jacques est emporté par une vague :
Candide veut se jeter après lui dans la mer : Pangloss l’en empêche, en lui prouvant que la rade de Lisbonne avait été formée exprès pour que cet anabaptiste s’y noyât.
C'est bien lĂ le fatalisme que Voltaire reproche Ă la philosophie optimiste : elle nous laisse dans l'inaction face au mal.
À Lisbonne, un séisme effroyable a détruit la ville.
Voltaire fait allusion à tremblement de terre réel qui détruisit Lisbonne en 1755. Dans son Poème sur le désastre de Lisbonne, il déplore la mort de dizaines de milliers d'innocents.
VI. Comment on fit un bel auto-da-fé pour empêcher les tremblements de terre, et comment Candide fut fessé
L'inquisition décide alors de faire brûler quelques hérétiques. Pangloss est pendu pour avoir parlé, Candide est roué de coups pour l'avoir écouté. Mais cela n'empêche pas la terre de trembler à nouveau.
Dans cette scène, Voltaire dénonce l'inquisition qui distrait le peuple avec des spectacles cruels et superstitieux.
> Pour en savoir plus, consultez mon commentaire sur le chapitre 6.
VII. Comment une vieille prit soin de Candide, et comment il retrouva ce qu’il aimait
Candide est soigné par une vieille qui l'emmène chez une belle dame : c'est Cunégonde !
— Quelle bonheur ! Vous n'avez pas été tuée par les bulgares ?
VIII. Histoire de Cunégonde
Cunégonde lui raconte alors comment elle fut violée et emmenée prisonnière par un capitaine bulgare.
— Quand il fut lassé de moi, il me vendit à un juif nommé Don Issachar qui me logea ici. Mais le grand inquisiteur le menaça d'un autodafé, et réussit à obtenir le droit de me visiter 1 jour sur 2.
Il m'invita à cet horrible autodafé, où je vis avec horreur Pangloss pendu et vous-même fouetté jusqu'au sang !
IX. Ce qui advint de Cunégonde, de Candide, du grand inquisiteur et d’un juif
Don Issachar et le grand inquisiteur débarquent l'un après l'autre, à l'improviste. Candide les transperce tous les deux d'un coup d'épée.
— Comment avez-vous fait, vous qui êtes né si doux, pour tuer en deux minutes un juif et un prélat ?
— Ma belle demoiselle, quand on est amoureux, jaloux, et fouetté par l’Inquisition, on ne se connaît plus.
X. Dans quelle détresse Candide, Cunégonde et la vieille, arrivent à Cadix, et de leur embarquement
Candide, Cunégonde et la vieille femme fuient alors à cheval pour la ville de Cadix.
Ils n'ont plus un sou, mais ils avisent une flotte en partance pour le Paraguay, où Candide, connaissant l'exercice bulgare, parvient à se faire enrôler comme capitaine pour mater une révolte de jésuites.
Pendant la traversée, la vieille leur raconte son histoire.
XI et XII. Histoire des malheurs de la vieille
Fille d’un pape, âgée de quinze ans, je vis ma mère coupée en quatre par des corsaires et je connus en 3 mois de temps la pauvreté, l’esclavage, et le viol.
Je fus revendue de sérail en sérail, jusqu'au jour où assiégés par les russes, les janissaires résolurent de manger une fesse à chacune de ces dames…
Je traversai toute la Russie, servante dans les cabarets, vieillissant dans la misère, avant de me retrouver chez don Issachar.
XIII. Comment Candide fut obligé de se séparer de la belle Cunégonde et de la vieille
À Buenos Aires, le gouverneur tombe amoureux de Cunégonde, tandis que Candide est poursuivi pour le meurtre du grand inquisiteur.
La vieille comprend rapidement la situation :
— Cunégonde, vous n’avez rien à craindre : le gouverneur vous aime et vous protège, mais Candide, fuyez dans l'heure ou vous serez brûlé.
XIV. Comment Candide et Cacambo furent reçus chez les jésuites du Paraguay
Candide avait amené de Cadix Cacambo : un valet plein d'expérience : il avait été sacristain, matelot, soldat, laquais.
— Mon maître, courons sans regarder derrière nous. Vous alliez faire la guerre aux jésuites ? Allons la faire pour eux. Los padres seront charmés d’avoir un capitaine qui fasse l’exercice à la bulgare.
Chez les jésuites, quelle surprise ! c'est le fils du baron qui est leur commandant ! Il raconte alors son aventure à Candide.
XV. Comment Candide tua le frère de sa chère Cunégonde
— Chassé par les bulgares, je fus secouru par un père jésuite qui m'envoya au Paraguay pour combattre les troupes du roi d'Espagne. Je devins et prêtre et commandant. Si ma sœur est retenue comme vous le dites à Buenos Aires, nous attaquerons la ville, pour la reprendre !
— C’est tout ce que je souhaite, car j'espérais l’épouser !
— Vous, épouser ma sœur qui est plus noble que vous ? Quelle impudence !
Le baron jésuite tire son épée, mais Candide est plus rapide et le transperce de part en part.
Cacambo garde son sang froid. Pendant que Candide se lamente, il lui met les habits du jésuite mort, et le fait monter à cheval :
— Galopons, mon maître ; on vous prendra pour un jésuite et nous aurons bien vite passé les frontières.
Voltaire emprunte ici au roman picaresque, un genre littéraire d'origine espagnole où l'on relate les aventures extravagantes de héros sans argent.
XVI. Ce qui advint aux deux voyageurs avec deux filles, deux singes, et les sauvages nommés Oreillons
Dans une prairie, Candide et Cacambo aperçoivent 2 femmes nues poursuivies par des singes. Candide veut les sauver, mais contre toute attente, elles fondent en larmes et embrassent les singes morts.
Candide et Cacambo fuient dans les bois et s'endorment sur un lit de mousse.
Mais ils se réveillent entourés d'indigènes Oreillons qui s'apprêtent à les manger.
— C’est un jésuite ! Vengeons-nous et faisons bonne chère ; mangeons du jésuite !
— Messieurs, vous comptez manger un jésuite ? Vous avez raison de traiter ainsi vos ennemis ! Mais, vous ne voudriez pas manger vos amis. Mon maître a tué un jésuite, et ne porte ses habits que pour mieux fuir !
Deux députés Oreillons viennent confirmer ce discours. Ils leur offrent alors des rafraîchissements, et les conduisent à leur frontière.
XVII et XVIII. Arrivée de Candide et de son valet au pays d’Eldorado, et ce qu’ils y virent
Candide et Cacambo prennent un canot et se laissent porter par la rivière, mais les rochers deviennent de plus en plus hauts, et les courant de plus en plus rapides. Ils finissent par s'échouer dans un pays inconnu.
Le sol est couvert d'or et de pierres précieuses. Les maisons sont des palais, les habitants sont aimables et se promènent tirés par des moutons à laine rouge. Ils apprennent que c'est le pays d'Eldorado.
Accueillis par le roi, Candide et Cacambo découvrent de magnifiques édifices publics, et même un palais des sciences, regorgeant d'instruments mathématiques.
Mais un jour, Candide dit Ă Cacambo :
— Si nous partons avec quelques moutons chargés de cailloux, nous pourrons aisément retrouver Cunégonde et acheter un royaume !
Cacambo tombe d'accord et nos deux héros font alors leurs adieux au roi d'Eldorado :
— Je ne conçois pas le goût de vos nations d'Europe pour notre boue jaune ; mais emportez-en tant que vous voudrez !
XIX. Ce qui leur arriva Ă Surinam, et comment Candide fit connaissance avec Martin
Sur la route de Surinam, ils perdent presque tous leurs moutons, et rencontrent un esclave, presque nu et atrocement mutilé :
— Mon Dieu ! que fais-tu là , mon ami, dans l’état horrible où je te vois ?
— J’attends mon maître, M. Vanderdendur.
— Est-ce lui, qui t’a traité ainsi ?
— Oui, monsieur, c’est l’usage. On nous donne un caleçon de toile deux fois par an. Quand la meule nous attrape le doigt, on nous coupe la main ; quand nous voulons nous enfuir, on nous coupe la jambe. Je me suis trouvé dans les deux cas.
— Ô Pangloss ! tu n’avais pas deviné cette abomination ; c’en est fait, il faudra qu’à la fin je renonce à ton optimisme !
À chaque étape, Candide confronte la philosophie optimiste à ce qu'il vient de vivre. C'est ici la première fois que Candide remet en cause la doctrine de son maître.
> Pour en savoir plus sur ce passage, consultez mon commentaire sur le chapitre 19.
À Surinam, Candide demande à Cacambo de récupérer Mlle Cunégonde pour lui :
— Tu es plus habile que moi, et tu n'es pas soupçonné d'avoir tué l'inquisiteur. Donne au gouverneur la somme qu'il voudra pour céder Cunégonde. Quand à moi, t’attendrai à Venise.
Un certain M. Vanderdandur remarque la richesse de Candide. Il lui propose de l'amener Ă Venise, mais il embarque ses moutons et le laisse Ă terre.
Candide devenu pauvre est obligé de prendre une cabine pour Bordeaux, avec un pauvre savant nommé Martin.
XX et XXI. Ce qui arriva sur mer Ă Candide et Ă Martin
Pendant la traversée, Candide demande à Martin ses conceptions philosophiques :
— Je pense que Dieu a abandonné ce globe à quelque être malfaisant. Je n’ai guère vu de ville qui ne désirât la ruine de la ville voisine. J'ai rencontré tant de crimes et de fléaux que je suis devenu manichéen.
Ils sont interrompus par un bruit de canon et voient deux bateaux qui combattent au large. L'un des vaisseaux est coulé, Candide reconnaît celui de Vanderdendur ! Il parvient même à récupérer un mouton !
— Vous voyez que le crime est puni quelquefois ; ce coquin de patron hollandais a eu le sort qu’il méritait.
— Oui, mais fallait-il que les passagers qui étaient sur son vaisseau périssent aussi ? Dieu a puni ce fripon, le diable a noyé les autres.
XXII. Ce qui arriva en France Ă Candide et Ă Martin
Une fois à Bordeaux, Candide décide de faire un détour pour voir Paris, car tout le monde parle de la capitale.
À Paris, rencontrent un petit abbé périgourdin qui les emmène au théâtre, puis chez la marquise de Parolignac.
Le souper fut comme la plupart des soupers de Paris : des plaisanteries insipides, de fausses nouvelles, de mauvais raisonnements, un peu de politique et beaucoup de médisance.
Après souper, la marquise mène Candide dans son cabinet :
— D'habitude, je fais languir 15 jours mes amants parisiens mais voyez-vous, je me rends à vous dès la première nuit pour faire les honneurs de la Westphalie.
La belle, ayant aperçu deux diamants aux mains de Candide, parvint à se les faire offrir.
Suite à un attentat, tous les étrangers sont suspects. Candide et Martin sont obligés de fuir pour l'Angleterre.
XXIII. Candide et Martin vont sur les côtes d’Angleterre : ce qu’ils y voient
— Vous connaissez l’Angleterre ; y est-on aussi fou qu’en France ?
— C’est une autre espèce de folie. Vous savez que ces deux nations sont en guerre pour quelques arpents de neige vers le Canada.
Sur le rivage anglais, il voient un homme fusillé calmement devant toute une assemblée extrêmement satisfaite. Un passager explique à Candide :
— C’est un amiral qui livré combat contre les français. Il n'avait pas pris assez de risques. Dans ce pays-ci il est bon de tuer de temps en temps un amiral pour encourager les autres.
Candide choqué paye le capitaine pour aller directement à Venise, sans débarquer.
XXIV. De Paquette et de frère Giroflée
À Venise, Candide ne retrouve ni Cacambo, ni Cunégonde :
— Vous êtes bien naïf de vous figurer qu’un valet qui a 5 millions dans ses poches ira chercher votre maîtresse pour vous l’amener à Venise !
Alors qu'ils passent sur la place Saint-Marc, ils aperçoivent un moine accompagné d'une jolie fille.
— Vous avouerez que ces gens-ci semblent heureux !
— Je gage que non.
Candide tient le pari et aborde les deux personnages. C'est Paquette, l'ancienne servante de Thunder-ten-tronckh ! Le moine s'appelle frère Giroflée.
— Injustement emprisonnée, j'ai dû me vendre au juge pour retrouver la liberté. Depuis, je fais ce métier abominable qui paraît si plaisant aux hommes, et qui n’est pour les femmes qu’un abîme de misère.
— Ce n'est guère mieux d'être moine : la jalousie et la discorde habitent le couvent. Je suis prêt tous les soirs à me casser la tête contre les murs du dortoir.
Candide n’en voulut pas davantage ; il avoua que Martin avait raison.
XXV. Visite chez le seigneur Pococurante, noble vénitien
À Venise, Candide et Martin décident un jour de rendre visite en gondole au sénateur Pococurante car il paraît que cet homme n'a jamais connu de chagrin !
Avant le dîner, il leur montre une galerie de tableaux qui semblent magnifiques aux yeux de Candide :
— Il sont de Raphaël, mais ils ne me plaisent point : la couleur est rembrunie, les figures ne sortent point assez ; ce n'est point là une imitation vraie de la nature.
Après le dîner, il les mène dans la bibliothèque. Candide, en trouve un exemplaire de l'Iliade et l'Odyssée d'Homère :
— Cette répétition continuelle de combats, ces dieux indécis, cette Hélène qu'on ne voit jamais, tout cela me cause le plus mortel ennui.
— Ah ! Voilà 80 volumes d’une académie des sciences : il se peut qu’il y ait là du bon.
— Il y en aurait, si un seul des auteurs de ces fatras avait inventé seulement l’art de faire des épingles ; mais parmi leurs vains systèmes il n’y a rien d'utile !
Candide et Martin prennent congé de Son Excellence :
— Voilà le plus heureux des hommes, car il prend plaisir à sentir des défauts où les autres croient voir des beautés.
— Ne voyez-vous pas au contraire qu’il est dégoûté de tout ce qu’il possède ?
On comprend que ce n'est pas la richesse qui fait le bonheur.
XXVI. D’un souper que Candide et Martin firent avec six étrangers, et qui ils étaient
Le carnaval de Venise approche, Candide et Martin prennent le souper avec 6 étrangers qui logent dans la même hôtellerie. Le serviteur d'un convive aborde alors Candide très discrètement : c'est Cacambo !
— Cunégonde est à Constantinople. Tenez-vous prêt à partir avec nous. Je ne peux vous en dire plus ; car je suis esclave et mon maître m'attend.
Pendant le souper, les six convives racontent leur histoire : quelle surprise de découvrir que tous les six sont des rois détrônés. En les écoutant Candide se trouve bien heureux de ne pas être roi !
On comprend que ce n'est pas le pouvoir qui fait le bonheur !
XXVII. Voyage de Candide Ă Constantinople
Après le souper, Candide et Martin embarquent avec Cacambo dans une galère pour Constantinople :
— Hélas, Cunégonde est retenue esclave chez un prince ! Mais ce qui est bien plus triste, c’est qu’elle est devenue horriblement laide.
— Ah ! belle ou laide, mon devoir est de l’aimer toujours.
Parmi les rameurs de la galère, Candide reconnaît deux forçats épuisés :
— Mais est-ce là monsieur le baron, que j’ai tué ? Et maître Pangloss, que j’ai vu pendre ?
— Quoi ! mais c'est Candide !
Candide paye le capitaine du bateau pour libérer les deux hommes et faire voile vers Constantinople.
XXVIII. Ce qui arriva à Candide, à Cunégonde, à Pangloss, à Martin, etc.
— Pardon, cher baron, de vous avoir donné un coup d’épée.
— N'en parlons plus, je fus trop vif je l'avoue. Je fus heureusement guéri par un frère apothicaire mais sur un malentendu je fus envoyé aux galères.
— Quand à moi, je devais être brûlé, mais vous vous souvenez que la pluie empêcha qu'on allume le feu ; je fus pendu, mais la corde était mouillée et glissa. Le chirurgien qui acheta mon corps tomba à la renverse en me voyant revenir à la vie. Je fus au service d'un marchand vénitien avant d'être envoyé aux galères.
— Eh bien ! mon cher Pangloss, pensez-vous toujours que tout va le mieux du monde ?
— Oui, car enfin je suis philosophe : il ne convient pas de me dédire, et Leibniz ne peut pas avoir tort.
XXIX. Comment Candide retrouva Cunégonde et la vieille
Arrivés à Constantinople, ils rencontrent tout de suite Cunégonde et la vieille qui étendent le linge.
Cunégonde est devenue horriblement laide, mais Candide, fidèle à sa promesse, la demande en mariage.
— Je ne souffrirai jamais une telle bassesse de sa part ni une telle insolence de la vôtre !
— Maître fou, j’ai payé ta rançon et celle de ta sœur ; elle est laide, j’ai la bonté d'en faire ma femme ; et tu t’y opposes !
Sur les conseils de Cacambo, le baron est alors rendu au capitaine de galère.
XXX. Conclusion
Avec le reste de son argent, Candide achète une petite métairie et s'y installe avec sa petite société. Mais Cunégonde devient acariâtre, la vieille se plaint de ses infirmités, Cacambo est excédé de travail, Pangloss est au désespoir de ne briller dans quelque université allemande, et Martin prend son malheur en patience.
Ils sont rejoints Paquette et le frère Giroflée qui sont devenus tout à fait misérables.
Un jour, Candide, Martin et Pangloss croisent un bon vieillard qui les invite chez lui, et leur présente des rafraîchissements particulièrement raffinés :
— Vous devez avoir une vaste et magnifique terre ?
— Je n’ai que vingt arpents, je les cultive avec mes enfants ; le travail éloigne de nous trois grands maux, l’ennui, le vice, et le besoin.
En retournant chez lui, Candide médite ces paroles, et enjoint toute sa petite société à travailler. Chacun donne le meilleur de soi : Cunégonde devient pâtissière, la vieille s'occupe du linge, Paquette brode, Giroflée devient menuisier. Seuls Pangloss et Martin ne changent pas vraiment.
Lorsque Pangloss essaye de remonter la chaîne des causes et des conséquences, Candide lui répond :
— Cela est bien dit, mais il faut cultiver notre jardin.
> Pour aller plus loin consultez mon commentaire sur le chapitre 30.