Couverture pour XVIIe siècle

Histoire littéraire du XVIIe siècle
Le mouvement baroque




La notion de baroque



Regardez ces perles, aucune n'est parfaite, elles sont irrégulières. Barocco, c'est un terme de joaillerie d'origine portugaise, pour désigner ce genre de perles irrégulières. Par métaphore, cela devient en français un mot de sens péjoratif pour désigner tout ce qui est bizarre, étrange, inachevé ou obscur. Exactement tout ce que les classiques rejettent, eux qui aiment tant l'ordre et la mesure !

Hé bien les œuvres baroques vont au contraire valoriser le désordre et le chaos. Tout un courant esthétique au XVIIe siècle transmet cette vision du monde : chaotique, irrégulière.

Les jeux d'ombre et de lumière, le thème de la mort, les trompe-l'oeil et les jeux de miroir disent que ce monde est transitoire, et que la réalité n'est qu'une illusion.

La mise en abyme du théâtre dans le théâtre laisse penser que le monde est lui-même un théâtre, où les humains sont des acteurs. C'est le thème du theatrum mundi.

Le classicisme et le baroque semblent complètement opposés, et pourtant les deux sensibilités esthétiques vont cohabiter au 17e siècle, parfois même au sein d'une même œuvre.

L'impétuosité du Cid de Corneille, ces combats pratiquement sur scène, cela provient bien d'une sensibilité baroque. Dans Phèdre de Racine, la mort d'Hippolyte, traîné par ses chevaux, parce qu'ils ont été effrayés par un monstre marin, c'est baroque également. L'errance du Dom Juan entre les femmes et les combats, jusqu'à sa mort finale, foudroyé par Dieu lui-même. Tout cela provient encore d'une sensibilité baroque.

Alors du coup, le baroque, ce n'est pas vraiment un mouvement. Les artistes de l'époque ne se disent pas « baroques » comme au XIXe siècle on pouvait se dire romantique ou naturaliste. En fait, ce sont des historiens de l'art du XXe siècle qui ont donné ce nom après coup, pour essayer de comprendre ce chaînon manquant entre l'art de la Renaissance et le classicisme proprement dit.

Jacob Burckhardt, par exemple, va interpréter le baroque comme une forme sauvage de l'art de la Renaissance. Pour lui, cela traduit une certaine décadence, une supériorité des Anciens face à l'incohérence de ce style.
L’architecture baroque parle la même langue que la Renaissance, mais elle en parle un dialecte sauvage [...] En face de tous nos jolis riens de style baroque, les anciens se dressent grandioses avec leur sens du beau et leur intelligence droite.
Jacob Burckhardt, Le Cicerone, Guide de l'Art Antique et de l'Art Moderne en Italie, 1855.

Mais l'élève de Jacob Burckhardt, Heinrich Wölfflin, un autre historien de l'art d'origine suisse, va nuancer cette interprétation. Dans son ouvrage Renaissance et baroque, il part du constat :
On a pris l'habitude d'entendre sous le nom de Baroque le style qui marque la dissolution de la Renaissance ou — selon une expression plus fréquente — sa dégénérescence [...]
Heinrich Wölfflin, Renaissance et baroque, 1888.

Il va alors réhabiliter la sensibilité baroque comme une esthétique à part entière.
Le baroque [...] n’est ni le déclin ni une perfection de l’art classique, il constitue un art tout à fait différent. [...] Toute innovation est un symptôme du style baroque naissant.
Heinrich Wölfflin, Renaissance et baroque, 1888.

Caractéristiques du baroque



Au départ, le mot « baroque » est pratique pour désigner les œuvres du XVIIe siècle qui n'entrent pas dans le classicisme.
Il y a beaucoup d’œuvres auxquelles l’étiquette classique ne convient nullement ; [...] mais il est tout à fait inexact et injuste d’appeler leurs auteurs des dissidents, des attardés, des égarés et je me demande pourquoi nous ne leur donnons pas le nom de roman baroque, de poésie baroque, de théâtre baroque.
Raymond Lebègue, Le théâtre baroque en France, 1942.

Prenons l'exemple des premiers vers du long poème Les Tragiques d'Agrippa d'Aubigné :
Puisqu’il faut s’attaquer aux légions de Rome,
Aux monstres d’Italie, il faudra faire comme
Hannibal, qui, par feux d’aigre humeur arrosez,
Se fendit un passage aux Alpes embrazez.
Mon courage de feu, mon humeur aigre et forte,
Au travers des sept monts fait breche au lieu de porte.
Je brise les rochers et le respect d’erreur
Qui fit douter Cæsar d’une vaine terreur.

Agrippa d'Aubigné, Les Tragiques, 1615.

Les critiques se rendent bien compte qu'une définition qui s'oppose simplement au classicisme est insuffisante. Alors Marcel Raymond fait une étude du style et des thèmes de cette littérature pour repérer les récurrences. Il décrit ainsi la poésie d'Agrippa d'Aubigné :
Poésie tourmentée, pathétique, avec des surcharges, des élans interrompus par de vers graves, d’une pensée mûrie, d’une noblesse toute espagnole. Poésie tragique nourrie d’angoisse ou d’extase. L’imagination chauffée à blanc prolonge l’instabilité naturelle au poète et engendre, par la vertu des contrastes et des pointes, une continuelle démesure.
Marcel Raymond, La Profondeur et le Rythme, « Du baroquisme et de la littérature en France aux xvie et xviie siècles », 1948.

On voit bien à travers cette description que la sensibilité baroque dépasse le champ de la littérature. En peinture, on retrouve un foisonnement de formes, des mouvements désordonnés, qui sont notamment visibles à travers les matières les plus fluides comme l'air et l'eau. Le thème du dernier souper introduit en plus le thème de la mort, qui plane sur toute la scène.
[...] Baroque est tout ce qui suit non les normes des proportions, mais le caprice de l'artiste. Dans les peintures de Tintoret, il y a toujours quelque chose d'étrange et d'insolite, il s'y trouve toujours quelque chose de baroque.
Pernety, Dictionnaire portatif de peinture, sculpture et gravure, 1757.

L'esthétique baroque s'exprime parfaitement dans la sculpture, car on est obligés de faire le tour d'une sculpture pour pouvoir la saisir complètement. Une sculpture met en mouvement et raconte une histoire. Cette sculpture de Bernini raconte un épisode des métamorphoses d'Ovide, Daphné poursuivie par Apollon échappe au dieu, mais se transforme en laurier. Ce mythe symbolise la vanité de tout désir.

Et la musique baroque ? Écoutez…
Au XVIIIe siècle, Rousseau utilise des mots très justes pour la décrire.
Une musique baroque est celle dont l'harmonie est confuse, chargée de modulations et dissonances, le chant dur et peu naturel, l'intonation difficile, et le mouvement contraint. Il y a bien de l'apparence que ce terme vient du baroco des logiciens.
Rousseau, Dictionnaire de Musique, 1768.

Rousseau fait référence au baroco des logiciens, qui est justement une forme de raisonnement détourné, qui invalide une information. Je vous donne un exemple :
Les œuvres classiques sont régulières.
Pourtant certaines œuvres d'art magnifiques ne sont pas régulières.
Donc toutes les belles œuvres d'art ne sont pas classiques.


Dans la musique baroque, justement, on va entendre un contrepoint, une mélodie différente derrière la mélodie principale.

L'art baroque se retrouve enfin dans le mobilier et l'architecture. Regardez par exemple la cathédrale Santiago de Compostelle qui se trouve en Galicie, en Espagne. Les décorations sont nombreuses, les pleins et les vides permettent de créer des contrastes forts d'ombre et de lumière.

Au XVIIIe siècle, on assistera à un renouveau du baroque notamment dans le mobilier, à travers le style rococo qui provient du mot « rocaille » : les détails sont chargés de courbes complexes, et l'aspect symétrique général est contredit par des détails qui n'ont plus rien de symétrique.


Contexte historique



D'abord, toute l'Europe est déchirée par des guerres de religion. L'Église catholique est remise en cause par la Réforme protestante. En face, la contre réforme est menée par les jésuites. C'est donc une période chaotique, tragique, de guerre civile incessante. La force des images de la poésie baroque représente bien la violence de ce contexte :
Je veux peindre la France une mère affligée,
Qui est entre ses bras de deux enfants chargée.
Le plus fort, orgueilleux, empoigne les deux bouts
Des tetins nourriciers ; puis, à force de coups
D’ongles, de poings, de pieds, il brise le partage
Dont nature donnoit à son besson l’usage :
Ce voleur acharné, cet Esau malheureux,
Faict degast du doux laict qui doibt nourrir les deux,
Si que, pour arracher à son frère la vie,
Il mesprise la sienne et n’en a plus d’envie [...]

Agrippa d'Aubigné, Les Tragiques, 1615.

Un dogme oppose notamment les catholiques et les protestants, sur la question de la liberté. Pour les Protestants, la liberté n'existe pas, Dieu a décidé de toute éternité qui irait au Paradis et qui irait en Enfer. C'est ce qu'on appelle la prédestination. En gros, l'Homme est irrémédiablement condamné au péché, sauf s'il a reçu la grâce de Dieu.

Au contraire pour les Catholiques, il y a ce qu'on appelle le libre arbitre : les Hommes doivent bien se comporter pour mériter le Paradis. Il faut mener une vie pieuse, faire la charité, prier, aller à la messe et se confesser auprès d'un prêtre. On peut même acheter des indulgences pour obtenir la rédemption. C'est là que les Jansénistes et les Protestants trouvent qu'il y a un abus : la crainte de l'Enfer n'est pas un motif moral à leurs yeux.

Dans l'architecture catholique, l'esthétique baroque est une réaction à l'égard de l'austérité protestante. Le foisonnement des formes impressionne le peuple, lui fait craindre l'Enfer, et lui donne l'image d'un monde incertain, transitoire, où seules les garants de la parole divine peuvent le guider. Et on retrouve ces idées dans la littérature, notamment dans le théâtre espagnol. Voici par exemple un extrait de La Vie est un Songe, La Vida es Sueño, du grand dramaturge espagnol Pedro Calderon de la Barca.

Le poisson naît, qui ne respire,
avorton d’ulves et de frai,
et à peine, vaisseau d’écailles,
sur l’onde se voit-il,
que le voici de tous côtés,
qui mesure l’immensité
de toute la capacité
que lui offre le centre froid.
Et moi, avec mon libre arbitre,
aurai-je moins de liberté ?

Le ruisseau naît aussi, couleuvre
qui se coule entre les fleurs,
et à peine serpent d’argent,
entre les fleurs se brise-t-il,
qu’il célèbre par sa musique
la tendresse des fleurs
qui lui offrent la majesté
des champs qui s’ouvrent sur son passage ;
et moi qui jouis de plus de vie,
aurai-je moins de liberté ?

Pedro Calderon de la Barca, La Vie est un Songe, 1635.

On voit ici comment le mouvement, la fluidité des éléments, la vie et les grands espaces permettent d'illustrer une réflexion sur la liberté, et le libre arbitre.

Dans La Vie est un Songe, le personnage principal, Sigismond, tour à tour prisonnier, et roi, ne sait plus où est la vie, et où est le songe. Ce n'est qu'en apprenant à déjouer les illusions du monde qu'il parviendra à devenir un bon roi. L'engaño, c'est-à-dire, l'illusion, s'oppose au desengaño, la désillusion, qui est provoquée sur le spectateur par la représentation théâtrale des faux-semblants du monde.

Et justement, au XVIIe siècle, l'homme est obligé de bouleverser ses représentations du monde. Chacun pensait alors que la terre était au centre de l'univers. C'était le géocentrisme, modélisé par Ptolémé. Mais Copernic remet en cause ce modèle, et Galilée fait les premières observations : peut-être bien que finalement, le soleil est au centre, et c'est la terre qui tourne. Vous savez que Galilée sera obligé de renier ses travaux sous la pression de l'Église catholique.

Mais il n'empêche que l'univers n'est plus aussi simple qu'il n'y paraissait. Peut-être que l'Homme n'est plus au centre de tout, et en tout cas, il n'est pas possible de se fier à ses sens. Il faut utiliser des instruments de mesure pour se guider, traverser les mers. Il a fallu réaliser qu'on avait découvert, non pas un chemin vers les Indes, mais un tout nouveau continent.

Après la découverte des Amériques, l'Empire espagnol connaît un grand développement, mais petit à petit, il entre en crise : l'or se fait plus rare que prévu, les guerres ruinent l'État, les dettes ne sont pas remboursées, les explorations coûtent cher, les colonies de peuplement vident la métropole.

Cette période d'incertitude politique explique que la sensibilité baroque, plus tourmentée, trouve son expression en Espagne, tandis qu'en France, le classicisme domine au moment où le règne de Louis XIV connaît son apogée. Mais ce n'est pas seulement en Espagne que le théâtre est touché par cette sensibilité baroque.

Oeuvres théâtrales



En Angleterre, le théâtre de Shakespeare est aussi tourmenté par ces mêmes questions métaphysiques, la brièveté de la vie révèle bien l'instabilité du monde et la vanité de toute chose.
HAMLET
Hélas ! Pauvre Yorick ! Je l'ai connu, Horatio ! C'était un compagnon d'une verve infinie, d'une exquise fantaisie ; il m'a porté sur son dos des milliers de fois. Et maintenant, maintenant... quelle horrible vision ! Mon cœur se soulève. Ici étaient ces lèvres que j'ai baisées, je ne sais combien de fois. Où sont vos plaisanteries maintenant ? vos cabrioles ? vos chansons ? et vos éclairs de gaieté qui faisaient rugir la table de rires ? plus un mot à présent pour vous moquer de votre propre grimace ?

William Shakespeare, Hamlet, Acte V, scène 1, 1603.

Dans Hamlet, c'est par une pièce de théâtre, mise en abyme dans la scène 2 du troisième acte, que le jeune prince révèle au roi usurpateur, qu'il est au courant du meurtre de son père. On retrouve la puissance du théâtre, capable de provoquer la désillusion.

En France, on retrouve les mêmes thématiques dans L'Illusion Comique de Corneille. Pridamant, guidé par Dorante, vient chercher des nouvelles de son fils Clindor chez un magicien Alcandre. Voilà leur arrivée aux abords de la grotte où vit ce magicien :
DORANTE.
Ce mage, qui d'un mot renverse la nature,
N'a choisi pour palais que cette grotte obscure.
La nuit qu'il entretient sur cet affreux séjour,
N'ouvrant son voile épais qu'aux rayons d'un faux jour,
De leur éclat douteux n'admet en ces lieux sombres
Que ce qu'en peut souffrir le commerce des ombres.
N'avancez pas : son art au pied de ce rocher
A mis de quoi punir qui s'en ose approcher ;
Et cette large bouche est un mur invisible,
Où l'air en sa faveur devient inaccessible,
Et lui fait un rempart, dont les funestes bords
Sur un peu de poussière étalent mille morts.

Corneille, L'Illusion Comique, 1636.

On retrouve les thèmes favoris du baroque : la présence de la mort rend tout incertain et faux. Le décor lui-même est une illusion : la nuit est un voile, l'entrée d'une grotte est un mur. Les démonstratifs révèlent une hypotypose, il donne à voir une description animée pour frapper le spectateur, et l'hyperbole finale correspond bien à un goût baroque pour l'exagération. Le stratagème du magicien révélera à la fin une mise en abyme du théâtre dans le théâtre, qui a justement pour objectif de désillusionner Pridamant.


Poésie



Nous avons déjà vu un extrait de poésie baroque avec Agrippa d'Aubigné. Un autre poète français baroque bien connu, c'est Théophile de Viau, critiqué par les classiques et notamment par Boileau, il est oublié au XVIIIe siècle, mais il est redécouvert par Théophile Gautier, qui en fait un précurseur du romantisme.

Un Corbeau devant moi croasse,
Une ombre offusque mes regards,
Deux belettes et deux renards
Traversent l'endroit où je passe :
Les pieds faillent à mon cheval,
Mon laquais tombe du haut mal,
J'entends craqueter le tonnerre,
Un esprit se présente à moi,
J'ois Charon qui m'appelle à soi,
Je vois le centre de la terre.

Ce ruisseau remonte en sa source,
Un bœuf gravit sur un clocher,
Le sang coule de ce rocher,
Un aspic s'accouple d'une ourse,
Sur le haut d'une vieille tour
Un serpent déchire un vautour,
Le feu brûle dedans la glace,
Le Soleil est devenu noir,
Je vois la Lune qui va choir,
Cet arbre est sorti de sa place.

Théophile de Viau, Oeuvres Poétiques, vers 1627.

La mort est présente partout dans ces vers : l'ombre est certainement un fantôme, qu'on retrouve un peu plus loin sous la forme d'un esprit. Charon, le passeur des enfer dans la mythologie antique, le centre de la terre...

Les contrastes sont saisissants : le tonnerre dans le ciel rime avec le centre de la terre, le feu est associé à la glace, le soleil est associé à la couleur noire, etc. Certaines images sont même simplement absurdes : l'eau défie la gravité en remontant vers la source, puis « un bœuf gravit sur un clocher [...] l'aspic s'accouple d'une ourse ». Cela nous fait entrer dans un monde incertain et inquiétant.

La Nature est changeante et instable, avec des verbes de mouvement variés : « traverser … passer … tomber … remonter … couler … devenir … choir … sortir » les temps eux-mêmes se contredisent : le présent de description côtoie le passé composé et le futur proche. Les 4 éléments sont représentés en mouvement, ou en pleine transformation : le tonnerre, le centre de la terre, le ruisseau, le feu, la glace, le soleil.

Dans le poème que Saint-Amant fait sur la solitude en 1617, on retrouve cette même thématique d'un paysage changeant, qui laisse entrevoir l'illusion, et provoque une ouverture sur l'infini.

Tantôt l'onde, brouillant l'arène,
Murmure et frémit de courroux,
Se roulant dessus les cailloux
Qu'elle apporte et qu'elle r'entraîne.
Tantôt, elle étale en ses bords,
Que l'ire de Neptune outrage,
Des gens noyés, des monstres morts,
Des vaisseaux brisés du naufrage,
Des diamants, de l'ambre gris,
Et mille autres choses de prix.

Tantôt, la plus claire du monde,
Elle semble un miroir flottant,
Et nous représente à l'instant
Encore d'autres cieux sous l'onde.
Le soleil s'y fait si bien voir,
Y contemplant son beau visage,
Qu'on est quelque temps à savoir
Si c'est lui-même, ou son image,
Et d'abord il semble à nos yeux
Qu'il s'est laissé tomber des cieux.

Saint-Amant, Oeuvres Poétiques, « La Solitude », 1617.

J'aimerais terminer sur un poème de Mathurin Régnier, qui écrit en 1613, sur son lit de mort, un poème profond et tourmenté, où l'on retrouve les mêmes thèmes d'une sensibilité baroque.

J'ai l'oeil scellé d'un sceau de fer ;
Et déjà les portes d'enfer
Semblent s'entrouvrir pour me prendre :
Mais encore, par ta bonté,
Si tu m'as ôté la santé,
Ô Seigneur, tu me la peux rendre.

Le tronc de branches dévêtu,
Par une secrète vertu
Se rendant fertile en sa perte,
De rejetons espère un jour
Ombrager les lieux d'alentour,
Reprenant sa perruque verte.

Où l'homme, en la fosse couché,
Après que la mort l'a touché,
Le coeur est mort comme l'écorce ;
Encor l'eau reverdit le bois,
Mais, l'homme étant mort une fois,
Les pleurs pour lui n'ont plus de force.

Mathurin Régnier, Oeuvre Poétique, « Quand sur moi je jette les yeux », 1613.

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